vendredi 8 octobre 2010

Plonger dans les épices de Zanzibar

Toujours pas de grasse matinée pour nous en ce lundi 4 octobre car nos jours de voyage sont comptés et nous mettons les voiles directement vers Zanzibar. Avant de sauter dans un taxi, nous avons juste le temps de réarranger nos sacs et de nous rendre compte que nous avons été victimes de pickpockets à la gare routière la veille – rien de très grave heureusement : le voleur nous a subtilisé notre couteau et une lampe de poche. Nous arrivons au port et retrouvons la même cohue africaine qu’à chaque gare de transport. Tout le monde essaye de nous vendre un billet pour Zanzibar mais heureusement notre chauffeur de taxi (espérant nous compter parmi ses clients à notre retour de Zanzibar) nous emmène jusqu’au guichet « officiel » du ferry qui part une demi-heure plus tard. Nous sentons que nous arrivons vers une destination beaucoup plus touristique que pendant les deux derniers mois car non seulement le ferry est moderne, rapide et respecte toutes les normes de sécurité, mais nous retrouvons aussi de nombreux touristes occidentaux.

Après deux heures de traversée sur une mer splendide, nous débarquons dans la ville de Stone Town (dont les vieilles bâtisses sont classées au patrimoine mondial de l’Unesco) et ça recommence : porteurs de bagage, taxis, rabatteurs d’hôtels, la clique habituelle ! Nous n’avons que deux jours et demi à passer sur l’île et nous voulons plonger au nord-est de Zanzibar et visiter la vieille ville. Nous partons donc directement vers une agence de plongée recommandée et organisons deux plongées le lendemain matin sur l’atoll de Mnemba. Notre première mission rondement menée, il est grand temps de manger et nous choisissons une petite terrasse à l’ombre des cocotiers, face à la mer. Nous allons nous plaire à Zanzibar… DSC06088DSC06183 Nous passons le reste de l’après-midi à flâner et nous perdre dans les ruelles de la vieille ville, avant de renouer avec nos habitudes asiatiques et de louer un scooter. Nous devons rejoindre le village de Matemwe, à 40km au nord-est de Stone Town, avant le coucher de soleil pour ne pas conduire de nuit. La route traverse de nombreux villages et plantations et nous retrouvons une végétation tropicale qui nous rappelle un peu Bali, les rizières en moins. La plupart des touristes de l’île se déplacent en minibus privé et le passage de deux occidentaux en scooter avec un gros sac à dos fait son effet : les gens au bord de la route nous saluent, les enfants crient à notre passage et les policiers installés à des endroits stratégiques (à l’ombre d’un arbre) profitent de l’occasion pour discuter un petit peu, nous rappeler les règles de sécurité et pourquoi pas recevoir un petit billet (mais la pression n’est pas trop forte).

La fin de la route devient beaucoup plus sportive, notamment quand elle se transforme en piste de sable au bord de la plage. Tous les talents de motard de Fred sont alors sollicités (Natacha décide de descendre du scooter et de marcher, c’est certainement plus sûr !).

Une fois à Matemwe, des habitants du village nous aident à trouver notre hôtel, bien caché sous les cocotiers. Nous avons réservé un petit bungalow dans un hôtel très simple mais qui donne directement sur une plage paradisiaque : cocotiers, sable blanc et barques de pêcheurs. DSC06105 Nous avons malheureusement raté de peu le coucher de soleil mais profitons quand même des dernières lueurs du jour pour une petite promenade sur la plage. Dans la soirée, le restaurant de l’hôtel nous propose de bons poissons grillés au curry, une obligation sur l’île aux épices ! Nous ne faisons pas de vieux os car nous voulons voir le lever de soleil le lendemain matin avant de partir plonger.

Nous nous réveillons donc à 6h15 pour voir le soleil se lever à 6h30 comme nous l’a indiqué notre hôte. Il ne doit pas le voir très souvent se lever car, lorsque nous arrivons sur la plage à 6h30, le soleil est déjà bien haut ! Tant pis, nous profitons de la belle lumière matinale pour une séance photos. Panorama Lever de Soleil Il est alors temps de rejoindre le club de plongée, situé dans un autre hôtel 10 minutes plus loin sur la plage. Un des inconvénients de la côte est de Zanzibar est que la mer se retire très loin à marée basse. Le bateau de plongée ne peut donc pas passer la petite barrière de corail ce matin et nous devons faire 45 minutes en bus sur des pistes en sable pour accéder à la passe où le bateau nous attend. L’équipage a eu la tâche ingrate d’amener le bateau jusqu’à cet endroit en pleine nuit à 3h du matin, lorsque la marée était haute. Il faut alors comparativement très peu de temps pour rejoindre le site de plongée à proprement parler, situé à quelques centaines de mètres de l’îlot de Mnemba. Nous sommes six plongeurs avec notre dive master et la première plongée nous fait dériver le long du corail à une vingtaine de mètres de profondeur. Lors de la mise à l’eau nous apercevons un groupe de dauphins qui prend peur et s’enfuit. Pendant la descente, nous avons également la chance de voir une tortue passer à proximité. Malheureusement le courant est tel qu’il est impossible de la suivre. Les fonds marins sont très colorés et nous observons notamment beaucoup de petits poissons que nous n’avions jamais vus auparavant. Après 45 minutes, il est temps de refaire surface, manger un petit peu, se réchauffer au soleil sur le pont et c’est reparti ! Pour notre deuxième plongée, la visibilité est un peu moins bonne, mais nous voyons plus de gros poissons : un très beau mérou, un gros requin à pointe blanche (assoupi et que nous réveillons…), quelques raies enfouies sous le sable, et enfin une très grosse tortue endormie sous un rocher. Le but avoué de cette plongée est de voir des requins, aussi nous restons assez longtemps à 20 mètres de profondeur dans l’espoir d’en découvrir d’autres. Nous n’en verrons pas plus, mais rester à cette profondeur augmente la consommation d’air de Fred et après 35 minutes, il est temps pour lui de refaire surface tandis que le reste du groupe peut rester 10 minutes supplémentaires. Au final, nous sommes très contents d’avoir plongé dans ce qui est quand même un lieu mythique. Il y a une très grande diversité de poissons, de coraux et de couleurs... mais ça n’arrive pas à la cheville des plongées dans le parc de Komodo !

Nous rentrons à Matemwe et sa plage magnifique nous tend les bras pour y passer l’après-midi au soleil. Nous nous laisserions bien tenter, mais notre hôtel n’a plus de chambre disponible et nous suivons donc notre programme initial, à savoir rejoindre Stone Town en scooter. En chemin, nous nous arrêtons dans une ferme aux épices, l’une des grandes attractions de l’île de Zanzibar. Comme nous pouvons nous déplacer seuls en scooter, cela nous évite de devoir visiter ces fermes dans un tour organisé. Nous nous arrêtons au hasard de la route en voyant les grands signes d’un guide local. Il nous amène dans la plantation pendant une petite heure. Il nous fait sentir les feuilles, les racines et les fruits des arbres cultivés. Nous découvrons ainsi le poivrier, l’arbre de la cannelle (l’écorce donne la cannelle que nous connaissons et les racines servent pour fabriquer le baume du tigre chinois), la cardamone, le gingembre, la vanille, l’avocatier, les racines de curry, les colorants naturels pour les masala... et bien entendu, l’épice reine de Zanzibar : le clou de girofle. Green PepperClous de Girofles FraisVanille A la fin de la visite, notre guide nous fait une démonstration de récolte de cocos et monte à la seule force des bras en haut d’un cocotier à 20 mètres de haut. Une performance impressionnante de force et d’agilité !

Nous sirotons le lait de coco pendant que nous faisons nos emplettes d’épices fraîches. Comme d’habitude nous sommes en retard et il est grand temps de rentrer à Stone Town pour y rendre le scooter.

Une fois arrivés à Stone Town, nous prenons un apéritif sur la plage au coucher du soleil. Le lieu idéal pour un entretien téléphonique d’embauche pour Natacha – affaire à suivre. DSC06160 DSC06167 Nous dînons dans un restaurant végétarien indien dont la carte nous fait saliver en souvenir des délicieux currys végétariens que nous avions goûtés en Inde. Malheureusement il n’y a plus grand-chose en cuisine et nous finissons avec un Thali (assortiment de petits mets indiens), malgré tout excellent et surtout bien trop copieux pour nos estomacs rétrécis.

Nous repartons nous perdre dans les ruelles de Stone Town le mercredi 6 octobre. Nous commençons par un tour au marché de Darajani où s’exposent toutes les productions de Zanzibar dont la fertilité de la terre a fait sa richesse au cours des siècles. DSC06213 Le passage par la halle aux poissons est un peu dur pour des non-initiés mais on y voit de très belles pièces, notamment des thons et des espadons entiers découpés à la machette : de quoi nous mettre en appétit. En fin de matinée, nous visitons la cathédrale anglicane, un lieu chargé en émotions. Jusqu’en 1873, Zanzibar était la plaque tournante du marché aux esclaves en Afrique. Les commerçants arabes y achetaient des esclaves capturés à l’intérieur du continent (Congo, Malawi, Mozambique et Tanganyika, l’ancien nom de la partie continentale de la Tanzanie) avant de les expédier aux quatre coins de l’Océan Indien. La cathédrale ayant été  érigée sur le lieu même de l’ancien marché aux esclaves, il ne reste à visiter de cette époque que deux cellules où étaient entassés les esclaves pendant trois jours sans eau ni nourriture afin de tester leur résistance. DSC06184 L’autel de la cathédrale se situe au-dessus de l’endroit où étaient ensuite fouettés les esclaves, de nouveau pour séparer les plus forts des plus faibles. Il est difficile de rester indifférent devant un lieu où s’est manifestée autant de cruauté. DSC06186Nous passons nos dernières heures sur l’île de Zanzibar à nous promener dans la vieille ville et y admirer les fameuses portes en bois sculpté, où se retrouvent, étroitement mêlées, les influences artistiques arabes et indiennes : de véritables œuvres d’art cachées dans la ville. DSC06214 Il est ensuite temps de reprendre le ferry vers Dar Es Salaam. Nous trouvons cette fois-ci des poufs installés  sur le pont arrière du bateau, ce qui rend le voyage d’autant plus agréable. Une fois à Dar Es Salaam, pas moins de 21 personnes (nous avons compté !) nous proposent de nous emmener à notre hôtel en taxi. Ayant fait le trajet à l’aller, nous savons maintenant qu’il ne nous faut pas plus de 10 minutes à pied. Cela nous permet aussi en chemin d’acheter nos billets de bus vers Arusha pour le lendemain matin. Dans la soirée, nous ne résistons pas et retournons manger un poulet tandoori cuit au barbecue dans un petit restaurant de rue. Décidément, l’influence indienne de Zanzibar a du bon et nous comprenons pourquoi les européens du XVème siècle parcouraient les mers au péril de leur vie pour le commerce des épices.

Deux jours et demi sur Zanzibar sont loin d’être suffisants et nous y serions bien restés une petite semaine. Nous avions beaucoup hésité avant d’y aller car les avis sur cette destination très touristique étaient très partagés. Il faut rajouter à cela le fait que se jouent en ce moment les élections présidentielles en Tanzanie, et que les tensions politiques entre Zanzibar et le reste du pays sont très importantes et ont déjà dégénéré par le passé. Nous avons bien vu quelques meetings électoraux, mais de l’extérieur cela avait l’air plutôt bon enfant. D’un point de vue culturel, il serait dommage de laisser Zanzibar de côté car l’île illustre bien le mélange des influences au cours des siècles : on y retrouve le Moyen Orient, l’Inde et les colons européens, le tout dans un creuset africain. DSC06206