samedi 10 juillet 2010

Mekoun, princesse dodue du Mondulkiri

Nous partons le samedi 19 juin à 8h du matin pour la province du Mondulkiri dans un bus local.

Le trajet dure 8h et notre conducteur est complètement fou ! La pause principale de la journée est dans un boui-boui en bord de route pour déjeuner. Cette fois-ci pas de cafards frits, sauterelles grillées ou oiseaux rôtis comme nous avons pu le voir sur la route. Ils n’ont qu’un menu en cambodgien et nous commandons donc comme le voisin… Pendant ce temps là, le conducteur et ses acolytes s’affairent à refroidir le moteur en versant des litres d’eau dans le radiateur. Avec un peu de chance, nous devrions réussir à finir le trajet.P1080770P1080774 Nous arrivons dans la ville de Sen Mororom en fin d’après-midi et trouvons une jolie petite guesthouse en dehors du centre ville. Notre tâche de la fin de journée est d’organiser notre trek à dos d’éléphant. Initialement nous avions repéré un organisme qui s’appelle Elephant Valley Project et combine une formation au métier de mahout (le conducteur et soigneur de l’éléphant) avec du trekking à dos d’éléphants. Malheureusement, le centre est fermé pendant la saison des pluies. Du coup nous suivons la recommandation d’un américain vivant ici depuis de nombreuses années, et partons avec un guide local. Au dernier moment, le guide que nous avons choisi à réussi à dégoter un autre groupe de touristes et nous met donc dans les mains de son neveu de 18 ans, qui a le mérite de mieux parler l’anglais que son oncle ! Le soir à l’auberge, Natacha a un coup de cœur culinaire en mangeant son premier bœuf lok-lak.

Nous partons le lendemain dimanche 20 juin pour notre trek à dos d’éléphant et nous rendons d’abord en voiture jusqu’au village de Bulung (15 min de route) où nous attend Mekoun, notre monture pour les deux prochains jours. On nous avait promis un vieux mahout expérimenté, le nôtre doit avoir 12 ans ! Mais il maîtrise bien son éléphant et il est doux avec lui, donc ça va. DSC01707DSC01783 La première étape de notre aventure consiste à monter sur Mekoun… Heureusement il y a une échelle ! Là-haut, nous nous asseyons dans un panier, avec les moustiquaires que nous utiliserons ce soir pour dormir en guise de coussins pour épargner nos fesses. Le panier est petit et les grandes jambes de Fred ont bien du mal à rentrer. Assez vite il doit les sortir sur les épaules de Mekoun pour être à l’aise. P1080863Nous partons très vite dans la forêt profonde et monter à dos d’éléphant est loin d’être reposant : il faut non seulement trouver la bonne position assise, mais aussi constamment faire attention à ne pas se prendre des branches dans la tête. Et pour ajouter un peu de challenge, quand nous devons nous frayer un passage en poussant les branches, ça fait tomber tous les insectes qui y vivent et nous devenons leur nouvel habitat. Il faut donc régulièrement vérifier quelle petite bête est un train de se balader sur nous. Après une grosse heure de marche, nous rejoignons une cascade qui sera notre étape pour le déjeuner. Il n’est encore que 10h30 et ca fait un peu tôt pour nous. Nous profitons donc du temps qui passe au bord de la cascade (tandis que notre guide s’offre une petite sieste) avant de déjeuner (au menu : fricassée de bœuf accompagnée de riz). DSC01739 Comme le temps est un train de tourner à la pluie, nous remontons rapidement voir Mekoun et nous repartons pour la deuxième partie de journée. Sur le chemin nous prenons une bonne pluie de mousson. Heureusement nous sommes à peu près équipés (cape de pluie pour nous, couverture étanche pour les sacs) mais il fait vite froid car nous sommes bien trempés. Mekoun nous fait ensuite une démonstration de force en abattant des arbres qui ont le malheur de se trouver sur son chemin, simplement sur ordre vocal du mahout ! Nous n’approuvons pas la démarche, mais c’est impressionnant ! P1080861-zoom

Nous arrivons à la « ferme » de la famille vers 15h. Nous avions bêtement pensé que la ferme serait effectivement une ferme, c’est en fait un toit… et c’est tout. Il n’y a pas de murs, juste une vaste planche qui sert à la fois de table pour manger et de sommier pour dormir (pas pour nous car nous dormons dans des hamacs). A l’extérieur, ils cultivent un peu de tout : du riz principalement mais aussi du maïs, des ananas, des courges, des bananes et d’autres légumes. Nous profitons du ruisseau qui coule le long du champ pour nous laver. L’eau est froide mais la situation idyllique.  Panorama Ferme Nous passons ensuite le reste de l’après-midi dans les champs, à regarder le temps qui passe et observer les enfants jouer dans la ferme. Nous discutons aussi avec notre guide, un cambodgien de 18 ans qui parle très bien l’anglais (il est allé à l’école internationale). Sa famille habitait Phnom Penh et avait du mal à joindre les deux bouts (alors que les deux parents travaillaient). Ils se sont installés dans le Mondulkiri il y a 5 ans pour y ouvrir un restaurant et depuis ont une meilleure vie, et se sont achetés une moto et un 4x4 ainsi qu’un lopin de terre pour y ouvrir leur propre restaurant (pour l’instant ils louent leur restaurant). Un bel exemple de classe moyenne qui marche au Cambodge ! Il est intéressant aussi d’entendre ce jeune homme, image du Cambodge moderne avec 3 portables (un pour chaque copine – il en a une à Sen Monorom et deux à Phnom Penh…) et des caleçons Abercombie & Fitch, nous expliquer les croyances des Pnong (l’ethnie locale à laquelle appartient la famille qui nous accueille pour la nuit). Par exemple il nous explique les relations entre les Pnong et leurs éléphants, qui sont considérés quasiment comme des humains et n’ont pas le droit d’avoir des enfants « hors-mariage »  (oui, il y a des cérémonies de mariage pour éléphants). Ou encore le fait que les relations sexuelles avant le mariage (humain cette fois) ont des conséquences néfastes pour toute la communauté (éléphants malades, mauvaise récolte…). Le plus intéressant est peut-être que notre guide nous avoue croire à ces croyances lui-même…

A 18h nous passons à table. La grand-mère de la famille nous a préparé du riz avec du bœuf sauté et des légumes ainsi qu’une soupe de poulet alors qu’elle a préparé pour elle et ses petits enfants des champignons et des légumes bouillis ramassés sur le chemin pendant notre ballade dans la forêt. Tout cela est bien entendu accompagné de riz, qui reste l’aliment principal. Le sens de la famille est clairement encore très fort au Cambodge, malgré les tentatives Khmer rouge de détruire les liens familiaux dans leur folie visant à recréer une société de toute pièce en faisant table rase du passé.  Ainsi notre guide et toute sa famille sont venus ensemble au Mondulkiri et travaillent tous dans leur restaurant : les parents, les enfants, les oncles et tantes et les cousines. De même, la famille Pnong avec laquelle nous passons ces deux journées est très soudée et nous sommes avec la grand-mère et 5 petits cousins qui jouent chacun un rôle. Il y a le mahout, l’assistant mahout, le ramasseur de légumes sur le chemin, le faiseur de lessive au bord du ruisseau et puis la petite dernière de 5 ans qui passe son temps à embêter ses grands cousins et se réfugier dans les jupes de sa grand-mère. Finalement il n’y a pas tant de différence que ça entre les enfants du monde... DSC01757P1080852

Nous patientons jusque 20h en faisant des photos, ce qui intéresse beaucoup les petits. Il est ensuite temps de se coucher – nous dans les hamacs avec moustiquaire, le guide dans son hamac mais posé sur la planche et la famille tous ensemble dehors sur la natte utilisée comme tapis de selle pour Mekoun (l’odeur doit quand même être assez forte). La pluie revient cependant vers 23h et ils se réfugient quand même sous le toit pour finir la nuit à peu près au sec, au bord du feu. Cela nous rappelle beaucoup nos nuits en Amazonie, dormant dans un hamac en extérieur avec les bruits de la jungle comme berceuse (les jaguars en moins donc nous sommes quand même plus tranquilles). Nous nous réveillons vers 7h après une nuit correcte et pouvons même manger une petite baguette pour le petit déjeuner ! Pendant ce temps là les enfants sont partis chercher Mekoun qui a passé la nuit dans la forêt pour laisser libre cours à son passe-temps favori : arracher tous les branchages à portée de trompe pour manger.DSC01768DSC01761 Nous partons vers 9h pour une grosse session de presque 3h – un peu long pour Fred qui n’arrive pas à trouver de position confortable dans le petit panier… La pause déjeuner au bord d’une cascade est la bienvenue. La cascade est plus accueillante que la veille et nous pouvons même nous y baigner, rejoints très vite par les enfants qui plongent du haut de la cascade. P1080889

Après le déjeuner c’est au tour de Mekoun de prendre son bain. Au début les mahouts doivent la forcer à rentrer dans l’eau mais une fois dedans elle se montre coopérative et semble apprécier que les mahouts lui grattent la tête et le reste du dos pour la laver. En sortant de l’eau, ne trouvant pas de serviette à sa taille, elle se sèche en se grattant sur un arbre au bord de la rivière. Ensuite c’est reparti pour 1 heure et demie de ballade pour retourner au village où habite la famille Pnong et où nous avons commencé notre trek.DSC01845 

Nous retrouvons alors notre chambre d’hôtel vers 17h, épuisés par ces deux jours intenses (surtout pour nos cuisses et nos fesses). Quel plaisir de pouvoir prendre une douche… froide malheureusement ! Nous terminons la journée en allant manger dans le restaurant de la famille de notre guide et y découvrons le barbecue cambodgien (proche du barbecue coréen mais avec plus de flammes donc beaucoup plus drôle).DSC01872